EQUATEUR : Reforestation a Tena
Il parle plutôt d’agroforesterie que de reforestation, ce qui nous étonne. On comprend que son but est d’abord social ; en aidant les agriculteurs à exploiter au mieux leurs terres, grâce à des arbres fruitiers et des arbres de coupe, il cherche avant tout à les faire mieux vivre.
Arrivés à Tena, on s’installe au Welcome break, auberge familiale tranquille avec hamacs et cuisine. On boit un coup sur le malecon, la promenade qui longe la rivière où les jeunes on l’habitude de retrouver. On rencontre Ilver et Javier, deux frères Kitchwas.
Quelques jours plus tard, on retrouve Antoine. On l’a rencontré trois soirs plus tôt autour d’un verre de guayusa. Il nous a parlé de son projet Ishpingo, il aide les communautés qui le souhaitent à replanter des arbres sur leurs terres. On l’accompagne quelques jours chez lui : on ramasse aux pieds des arbres des citrons dont on extraira les pépins ainsi que 500 graines germées d’arbres locaux qu’on replantera tout de suite à l’intérieur de sa pépinière. Antoine prépare un mélange naturel de micro-organismes, le biol, à base de cosses de café et de lait, entre autres, pour dynamiser les sols. Il parle plutôt d’agroforesterie que de reforestation, ce qui nous étonne. On comprend que son but est d’abord social ; en aidant les agriculteurs à exploiter au mieux leurs terres, grâce à des arbres fruitiers et des arbres de coupe, il cherche avant tout à les faire mieux vivre. En effet, avec les générations, les parcelles indigènes sont de plus en plus morcelées et les villageois doivent faire vivre leurs familles sur des terres où les arbres centenaires ont souvent déjà été coupés et vendus.
Ça nous plaît de travailler avec la nature et de vivre aussi simplement mais on doit rentrer à Tena car on a rendez-vous un soir avec Ilver et Javier. On les retrouve à nouveau le lendemain matin pour une partie de foot dans un village indigène. C’est un championnat inter-communautés et tout le monde prend ça à cœur. On est les deux seuls étrangers et on vit un moment fort en plein milieu de leur communauté. Ici, le foot est très répandu aussi chez les filles et l’équipe d’Elisabeth (leur sœur) joue aussi après. Les plus vieux m’invitent à picoler, sous le soleil de 11h00, un alcool fort artisanal : le venticinco. Nos copains Ilver et Javier gagnent et leur père paye le venticinco à toute l’équipe !
Lundi matin, Antoine vient nous chercher. On s’est organisé avec lui pour passer cinq jours dans la communauté Ishki Rumi (qui signifie « deux pierres »). Edwin, le père de famille, nous accueille et les bottes aux pieds, on apprend à manier la machette pour désherber le terrain autour de jeunes pousses d’arbres fruitiers. Cela n’a pas été fait depuis six mois et une couche dense de végétation s’élève déjà à 1,50 m. On sue à grosses gouttes en donnant de grands coups de machette au ras du sol. La famille qui nous accueille possède aussi sa propre pépinière et on y replante les arbres qui sont déjà grands.
A seulement 30 ans, Edwin et sa femme Julia ont déjà six enfants. Ils habitent une grande maison de bois simple et confortable avec gaz et électricité. Ils passent beaucoup de temps ensemble et le soir, tout le monde reste dans la même pièce commune à jouer et à parler. Edwin et Julia sont toujours de bonne humeur ce qui est un peu déstabilisant au début car ils rient tout le temps et plaisantent de tout, surtout Julia. Les enfants nous regardent avec curiosité. Ils nous épient sans oser beaucoup nous parler et quand nous nous lavons à moitié nus dans la rivière, Émilie et Karine se marrent énormément.
Le travail est fatigant mais le rythme de vie est agréable. Julia prépare souvent de délicieux jus de fruits pour nous rafraîchir. La joie de vivre et la tranquillité de tous les membres de la famille nous envahissent. Nous commençons aussi à être plus à l’aise avec eux, et inversement bien sûr.
Un matin, nous partons en forêt avec Edwin et Julia qui porte la petite Sandia dans son dos. On y coupe de grandes feuilles de maito, puis on les rassemble en ballot, huit au total, pour les vendre à Antoine. Il les utilisera ensuite dans son restaurant typique qu’il tient avec sa femme qui est équatorienne.
Le dernier jour, la plantation est remise à niveau et on va chercher de l’or dans le fleuve Jatunyacu qui passe tout près. Edwin nous apprend à laver l’or à la méthode traditionnelle, à l’aide d’une seule bassine en bois. C’est amusant et en deux heures on trouve l’équivalent de 15 $ d’or. On les laisse de bon cœur à la famille Cerda, à l’exception d’un trophée : la plus belle paillette de la matinée. Le soir, on improvise un tournoi de billes sur la grande table avec des obstacles et les enfants adorent. Les six jours passés avec eux resteront un des moments les plus forts du voyage… Une magnifique famille.
Bertrand Sinssaine 3 septembre 2012
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